Lance Armstrong a fait voler en éclats son histoire "mythique et parfaite" en avouant pour la première fois s'être dopé durant sa carrière -en particulier pendant ses sept Tours de France victorieux-et avoir tissé pendant plus de dix ans un "gros mensonge".

L'Américain, passé aux aveux face à l'animatrice Oprah Winfrey jeudi dans une émission de télévision dépourvue d'émotion, a reconnu son passé sans toutefois entrer dans les détails, ni exprimer de regrets.

Il a paru complètement maîtriser son discours, replaçant ses actes dans "la culture" de l'époque.

Dans sa première interview depuis qu'il a été déchu en octobre de ses titres et radié à vie, il a évacué une décennie de farouches dénégations en avouant par quelques +oui+ tranchants qu'il n'avait pas roulé proprement.

"Je vois cette situation comme un gros mensonge que j'ai répété de nombreuses fois, a-t-il dit, le visage grave. J'ai pris ces décisions, ce sont mes erreurs. Je suis là pour dire que je suis désolé. Tout est de ma faute."

"Je vais passer le reste de ma vie à tenter de regagner la confiance des gens", a expliqué le Texan de 41 ans, qui a jugé impossible de gagner sept fois le Tour de France d'affilée, comme il l'a fait de 1999 à 2005, sans se doper.

Ca "faisait partie du boulot"
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Armstrong a assuré que se doper "faisait partie du boulot" mais qu'il n'avait jamais forcé ses équipiers à le faire, même s'il a reconnu avoir intimidé ceux qui ne croyaient pas à l'histoire "mythique, parfaite", dans laquelle "il s'est perdu", de survivant du cancer capable d'écraser la plus grande course du monde à la seule force de ses mollets et de sa volonté.

Cintré dans une chemise bleu et un blazer foncé, il a aussi assuré qu'il n'avait eu pas l'impression de tricher. "Cela fait peur", a-t-il dit à propos de son attitude durant son règne sans partage sur le peloton.

"Mon cocktail c'était l'EPO, les transfusions (sanguines) et la testostérone", ajoutant aussi la cortisone et les hormones de croissances à cette liste, comme l'avait souligné l'Agence antidopage américaine (Usada) dans le rapport qui a précipité sa chute.

Il a toutefois nié s'être dopé lors des Tours de France 2009 et 2010, lorsqu'il avait repris la compétition après une première retraite, comme l'Usada l'affirme. Il a daté son dopage du milieu des années 90 à 2005.

"Si je n'avais pas repris la compétition (en 2009), nous ne serions pas assis là", a-t-il expliqué, estimant que les confessions de son ancien coéquipier Floyd Landis en 2010 avaient été le moment clé dans l'enchaînement qui a provoqué sa chute.

L'Américain a qualifié son dispositif de "professionnel et intelligent" mais n'en a pas expliqué le fonctionnement, laissant en suspens de nombreuses questions notamment sur les complicités dont il a pu bénéficier pour échapper aux contrôles aussi longtemps.

"Je ne veux accuser personne"
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"Je ne veux accuser personne, ce sont mes erreurs", a-t-il dit, ajoutant même que le préparateur italien Michele Ferrari était "un homme bon".
Pour le président de l'Usada, Travis Tygart, comme pour le président de l'Union cycliste internationale (UCI) Pat McQuaid, Armstrong a fait "un pas".
En admettant que "sa carrière était bâtie sur un puissant mélange de dopage et de tromperie", Armstrong a "fait un petit pas" selon Tygart, qui veut maintenant l'entendre sous serment décrire l'ampleur complète de ses activités illicites.


En collaborant avec les autorités antidopage, Armstrong pourrait obtenir une réduction de sa suspension à vie.
Si une "commission vérité et réconciliation" voit le jour pour mettre fin à l'omerta sur le dopage dans le peloton, comme le souhaite l'Usada mais pas l'UCI, il "sera le premier sur le pas de la porte".
L'ancien leader de l'US Postal, qui a plusieurs fois répété qu'il n'était "pas un fan de l'UCI", a reconnu avoir fait une donation à l'instance mondiale du cyclisme parce que celle-ci "lui avait demandé", mais pas en échange du camouflage d'un contrôle positif (au Tour de Suisse 2001).
"Armstrong a confirmé qu'il n'y avait pas de collusion ou de complot entre l'UCI et Lance Armstrong. Il n'y avait pas de contrôles positifs qui ont été camouflés et il a confirmé que les dons faits à l'UCI étaient destinés à soutenir la lutte antidopage", s'est réjoui McQuaid.

Risques de poursuite
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Le face à face entre Armstrong et Winfrey fera l'objet d'un deuxième partie vendredi aux Etats-Unis (21h00 heure de l'Est) Livestrong, la fondation de lutte contre le cancer qu'il avait fondée en 1997 après avoir vaincu la maladie mais avec laquelle il a coupé les ponts, s'est dite "déçue" d'entendre que son héros a "trompé les gens".
Ces aveux exposent Armstrong, qui a été prié jeudi par le Comité international olympique (CIO) de rendre sa médaille de bronze du contre-la-montre des jeux Olympiques de Sydney (2000), à des risques de poursuites par le gouvernement américain.
Le Texan, qui doit rembourser les primes de course touchées pendant son règne, est déjà menacé par deux procès au civil (par l'hebdomadaire britannique Sunday Times et l'assureur américain SCA Promotions) pour des sommes qui au total dépasseraient 10 millions de dollars et il pourrait maintenant être assailli par d'anciens parraineurs ou partenaires estimant avoir été dupés.